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regards et des grimaces qui manquaient complètement d’attrait. Les guerriers le regardaient aussi d’un fort mauvais œil.

Mais le missionnaire laissait passer les injures, s’humiliait devant les menaces, et attendait patiemment que le vieux chef pût imposer son autorité, et le faire respecter par son entourage. De temps en temps le moribond paraissait se ranimer, et en entendant les imprécations et les paroles menaçantes de ses femmes, il faisait signe au missionnaire de ne pas s’en aller.

Le courageux missionnaire passa ainsi deux jours et deux nuits, priant en silence, et souffrant du froid et de la faim, attendant l’heure de Dieu.

Est-ce que Dieu pouvait abandonner cette âme qui l’avait appelé ? Est-ce qu’il n’entend pas des profondeurs de l’infini l’humble soupir que l’enfant des bois pousse vers lui du fond de son wigwam ?

L’heure de Dieu vint enfin. Le troisième jour (c’est le troisième jour que le Christ ressuscita !) le malade fit un effort, s’assit sur sa couverte et dit à l’homme de la prière qu’il voulait être baptisé.

Les femmes se précipitèrent sur lui, le recouchèrent et voulurent éloigner le prêtre. Mais alors un des guerriers s’interposa et interrogea le moribond.

Quand ses réponses fermes et nettes l’eurent convaincu que le vieux chef voulait résolûment recevoir