Page:Routhier - À travers l'Europe, impressions et paysages, Vol 1, 1881.djvu/343

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
373
PARIS

il a été pour la France ce qu’Achille a été pour la Grèce et la poésie a chanté sa mort comme elle a chanté la colère d’Achille, mais le sujet du drame appartient à la légende plutôt qu’à l’histoire. Permettez moi d’en faire l’analyse :

Par la trahison de Ganelon, un corps d’armée de Charlemagne dans lequel combattait Roland a été surpris dans un étroit vallon des Pyrénées, et écrasé par les Sarasins d’Espagne, comme le fut la garde impériale à Waterlo. Roncevaux, le funeste vallon, est devenu le tombeau de Roland et des plus illustres chevaliers de France.

À cette nouvelle, la belle Aude, épouse de Roland, est tombée morte, laissant une enfant nommée Berthe.

La mère de Roland était sœur de Charlemagne ; elle avait épousé en premières noces Milon, Duc de Bretagne, qui fut père de Roland, et en secondes noces Ganelon, le traître ! En apprenant la mort de son fils par la trahison de son mari elle mourut de douleur, laissant un fils de Ganelon encore à la mamelle. Le traître fut mis en jugement et condamné. On le lia à un cheval fougueux qu’on chassa dans les bois, et qui devait l’écarteler, livrer ses membres en pâture aux bêtes fauves. On le crut mort et son nom devint l’objet de l’exécration universelle, comme celui de Judas. Quant à son fils, il avait disparu, on ne savait comment.

Or Ganelon n’était pas mort. Des moines avaient rencontré dans la forêt le cheval qui devait être son bourreau, et ils avaient emporté Ganelon mourant