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et des souffrances de ceux qui se laissent entraîner à un amour adultère. Il leur représente sous les couleurs les plus sombres la solitude qui se fait autour de cet amour coupable, le poids accablant de ces chaînes honteuses qu’il faut traîner, le remords qui atteint bientôt la femme, et qui la fait pleurer en voyant passer

« La moindre paysanne au bras de son mari !…
Pauvre femme ! Ses yeux errant dans l’étendue,
Comme pour y chercher la paix qu’elle a perdue,
Tâche de découvrir par delà l’horizon
La place bienheureuse où fume sa maison,
La maison où jadis elle entra pure et vierge…
Tandis que, derrière elle, une chambre d’auberge
Garde pour compagnon à ses mornes douleurs
Un étranger pensif dont la vie est ailleurs ! »

Enfin il plaide la cause de la fidélité conjugale, du bonheur domestique, de la véritable poésie de la vie de famille, et il le fait avec tant d’esprit et dans de si beaux vers que Gabrielle est subjuguée. — La poésie surtout l’a soudainement émue et convertie ; elle donne son congé à l’insignifiant Stéphane, et elle demanderait peut-être pardon a son mari ; mais il la prévient :

« Dans ton égarement d’un jour, je me demande
Lequel de nous, pauvre âme, eut la part la plus grande. »

Et il termine ainsi ses réflexions bonasses :

« Tu le vois, mon enfant, dans ce pas hasardeux
Tous deux avons failli ; pardonnons-nous tous deux ! »