Page:Routhier - À travers l'Europe, impressions et paysages, Vol 1, 1881.djvu/197

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
222
PARIS

Je me promène tout de même, et quand la bise froide se fait trop sentir, j’entre dans un café. Je déguste un excellent moka, et je lis un journal, tantôt l’un, tantôt l’autre, presque jamais le même, car je veux les connaître tous; ou bien, j’écoute discourir un groupe de parisiens ou d’étrangers dont la conversation m’intéresse.

Fuis, je reprends ma promenade en bravant le froid et le vent. C’est égal, je ne me plaindrai plus de nos rigoureux hivers. Notre neige vaut mieux que la boue glacée de Paris, et il y a des jours où je serais tenté de regretter nos appartements si chauds, nos fourrures si moelleuses, et nos grands sleighs où nous prenons si confortablement des bains d’air froid.

Mais pour me faire oublier tout cela, que de jouissances intellectuelles Paris me procure !

Au Canada, je ne pouvais étudier l’histoire, la littérature et l’art que dans les livres, enfermé dans ma bibliothèque. Ici, j’apprends, ou je crois apprendre, sans étudier. Les rues, les places publiques, les églises, les palais, les musées me donnent des cours sur presque toutes les branches de l’enseignement humain.

Une statue, un vieux mur, un frontispice, une colonnade, une peinture, une inscription,une armoirie, m’en disent plus qu’un volume, et quand je les contredis ils ne répliquent pas. Quand ils me déplaisent, je n’ai qu’à fermer les yeux, et même dans ce cas ils m’enseignent encore.

Lorsque je suis fatigué des leçons des choses — car