xii
GRENADE
Notre arrivée à Grenade a quelque peu ressemblé à un rêve, troublé de cauchemars. C’était la nuit, mais une nuit sans lune, avec des nuées de pompiers qui arrosaient la terre à torrents. Pas une étoile, pas même une filante, n’accordait un regard à cette terre privilégiée de l’Andalousie.
En sortant de la gare, je demandai l’hôtel de los Siete Suelos. Un cocher fantastique surgit de l’ombre à cette appellation, et nous entassa dans une voiture étrange, traînée par quatre ou cinq bêtes efflanquées qui ressemblaient à des chevaux. D’autres voyageurs arrivèrent, montèrent à l’avant de l’omnibus, et se logèrent dans une espèce d’alcôve que je ne saurais vous décrire, mais qui était déjà encombrée de colis. Puis notre automédon de féerie s’installa quelque part sur la queue des chevaux, leur adressa un juron cabalistique qu’ils parurent comprendre, fit claquer un fouet sonore, et notre équipage-fantôme s’ébranla.