« Mélicenda chevauche à côté de Gaïferos sur un cheval alezan pris aux Maures. Ils s’en vont devisant d’amour, d’amour et non pas d’autre chose. Ils n’ont aucune peur des Maures, et ne se soucient point d’eux. Heureux tous deux ils ne cessent de marcher, de nuit par les chemins, de jour par les halliers ; se nourrissant d’herbe verte et d’eau quand ils en peuvent trouver, jusqu’à ce qu’ils rentrent en France, la gentille, et en terre de chrétienté.
« Au bas d’une montagne, ils voient venir de loin un chevalier portant des armes blanches. Gaïferos s’apprête à le combattre, mais les chevaux se sont reconnus et commencent à hennir. C’est Montésinos qui vient au devant de son cousin Gaïferos avec son cheval et ses armes.
« Les deux cousins se font grand accueil, et les deux époux reprennent leur route, devisant d’amour et ne voulant pas parler d’autre chose. Tous les chevaliers qu’ils rencontrent veulent les accompagner. À sept lieues de Paris, l’empereur vient pour les recevoir ; avec lui vient Olivier, avec lui vient Roland, avec lui vient l’infant Guarinos, l’amiral de la mer, avec lui vient don Belmudèz, et le bon vieux don Beltram avec beaucoup des douze pairs qui mangent le pain à la même table.
« Avec lui vient la belle Aude, la fiancée de Roland, avec lui vient Julianna, la fille du roi Julian ; duègnes, dames et damoiselles du plus haut lignage. L’empereur embrasse sa fille en ne cessant point de pleurer.
« Toutes les fêtes qu’ils firent ne se peuvent raconter. »