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l’autre, qu’à pareil jour autrefois nous avions coutume de brûler un juif, ton tour est venu ; allons, pourceau, à la fournaise ». Et aidé de quelques coreligionnaires, que la dispute avait attroupés, il entraînait le malheureux vers le four flambant d’un boulanger. Celui-ci put heureusement fermer sa boutique et, avec le concours de ses ouvriers, résister aux assiégeants jusqu’à l’arrivée de la force publique.

J’étais alors préfet du département, j’avais la responsabilité de l’ordre public. Je fus tout de suite informé. J’empêchai la police de verbaliser, parce qu’un procès pouvait soulever des incidents graves, et qu’il fallait avant tout maintenir la paix entre les citoyens, à une époque où l’insurrection indigène rétrécissait chaque jour son cercle autour de nous. Mais je fis venir l’Arabe cause du tumulte, pour l’admonester. « Nous autres hadars (citadins), me dit-il, nous sommes avec les Français, et nous y avons quelque mérite en présence des excitations et des menaces qui nous arrivent continuellement du dehors, mais si cette vermine juive peut impunément nous injurier dans la rue, nous sortirons de la ville, et nous irons rejoindre nos frères. D’ailleurs, cet homme est un voleur ; 1l m’a pris trois fois par les intérêts le capital