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duc Gjörtz, s’était follement épris de la belle Christel, épouse d’un de ses vassaux, le baron Skjelderup.

Gjörtz manda auprès de lui le reître Aag, forban sans scrupules, qui, pourvu qu’on le payât bien, ne reculait devant aucune besogne.

En termes ardents, le suzerain exposa l’irrésistible amour qui lui étreignait le cœur — et promit une fortune au reître pour le jour béni où, grâce à un discret enlèvement, il lui amènerait seule et sans défense celle dont l’image le hantait jusque dans ses rêves.

Afin d’éviter toute compromission, Gjörtz se masquerait avec un loup pour assouvir son désir. Sachant qu’une plainte adressée au roi l’exposerait aux plus terribles représailles, il voulait priver Christel de preuves et même de soupçons.

Aag se mit en campagne et alla se loger proche la résidence du baron pour guetter l’occasion favorable.

Un soir, embusqué dans le parc du château qu’il épiait sans cesse, le reître vit Christel, que les hasards d’une promenade solitaire conduisaient de son côté. Au moment opportun, il