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Au troisième acte, penché, parmi des roches, sur une sorte de puits qui devait le conduire aux enfers, Énée appelait Caron par plusieurs « hôô » sans cesse plus élevés et plus forts. Le dernier, très perché, fournissait à Nourrit, par une habile attention du compositeur, l’occasion d’émettre, avec sa puissance maxima, son fameux ut aigu, cité dans toute l’Europe. Or cette note, suivie d’une explosion d’enthousiasme, était le clou de chaque représentation et faisait beaucoup parler d’elle.

Josolyne, l’un des premiers caricaturistes de l’époque, résolut d’exploiter la vogue de ce son transcendant.

Il fit une charge où l’on voyait le célèbre do sortir de la bouche de Nourrit, penché vers les enfers, et parvenir au nadir, après s’être propagé à travers toute la terre.

Par là, Josolyne voulait indiquer que la note renommée, sans se soucier d’aucun obstacle, résonnait jusqu’aux régions stellaires.

La maison Soum, alors tenue par le bisaïeul de Louis-Jean, tira de l’œuvre mille exemplaires, dont la vente devait, à chaque représentation d’Énée, accompagner celle du programme.