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qui pût être garant de la fidélité des contractants, ni les forcer à remplir leurs engagements réciproques, les parties demeureraient seules juges dans leur propre cause et chacune d’elles aurait toujours le droit de renoncer au contrat, sitôt qu’elle trouverait que l’autre en enfreint les conditions ou qu’elles cesseraient de lui convenir. C’est sur ce principe qu’il semble que le droit d’abdiquer peut être fondé. Or, à ne considérer, comme nous faisons, que l’institution humaine, si le magistrat qui a tout le pouvoir en main et qui s’approprie tous les avantages du contrat, avait pourtant le droit de renoncer à l’autorité ; à plus forte raison le peuple, qui paye toutes les fautes des chefs, devrait avoir le droit de renoncer à la dépendance. Mais les dissensions affreuses, les désordres infinis qu’entraînerait nécessairement ce dangereux pouvoir, montrent plus que toute autre chose combien les gouvernements humains avaient besoin d’une base plus solide que la seule raison et combien il était nécessaire au repos public que la volonté divine intervînt pour donner à l’autorité souveraine un caractère sacré et inviolable qui ôtât aux sujets le funeste droit d’en disposer. Quand la religion n’aurait fait que ce bien aux hommes, c’en serait assez pour qu’ils dussent tous la chérir et l’adopter, même avec ses abus, puisqu’elle épargne encore plus de sang que le fanatisme n’en fait couler : mais suivons le fil de notre hypothèse. Les diverses formes des gouvernements tirent leur origine des différences plus ou moins grandes