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est presque nulle, il me reste à montrer son origine, et ses progrès dans les développements successifs de l’esprit humain. Après avoir montré que la perfectibilité, les vertus sociales et les autres facultés que l’homme naturel avait reçues en puissance ne pouvaient jamais se développer d’elles-mêmes, qu’elles avaient besoin pour cela du concours fortuit de plusieurs causes étrangères qui pouvaient ne jamais naître, et sans lesquelles il fût demeuré éternellement dans sa condition primitive ; il me reste à considérer et à rapprocher les différents hasards qui ont pu perfectionner la raison humaine, en détériorant l’espèce, rendre un être méchant en le rendant sociable, et d’un terme si éloigné amener enfin l’homme et le monde au point où nous les voyons.

J’avoue que les événements que j’ai à décrire ayant pu arriver de plusieurs manières, je ne puis me déterminer sur le choix que par des conjectures ; mais outre que ces conjectures deviennent des raisons, quand elles sont les plus probables qu’on puisse tirer de la nature des choses et les seuls moyens qu’on puisse avoir de découvrir la vérité, les conséquences que je veux déduire des miennes ne seront point pour cela conjecturales, puisque, sur les principes que je viens d’établir, on ne saurait former aucun autre système qui ne me fournisse les mêmes résultats, et dont je ne puisse tirer les mêmes conclusions.

Ceci me dispensera d’étendre mes réflexions sur la