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sont plus en état de se procurer tout ce qu’ils désirent. « Ils ne travaillent que pour les riches. » Au train que prennent les choses, je ne serais pas étonné de voir quelque jour des riches travailler pour eux. « Et ce sont les riches oisifs qui profitent et abusent des fruits de leur industrie. » Encore une fois, je ne vois point que nos artistes soient des gens si simples et si modestes. Le luxe ne saurait régner dans un ordre de citoyens, qu’il ne se glisse bientôt parmi tous les autres sous différentes modifications, et partout il fait le même ravage.

Le luxe corrompt tout, et le riche qui en jouit, et le misérable qui le convoite. On ne saurait dire que ce soit un mal en soi de porter des manchettes de point, un habit brodé et une boîte émaillée, mais c’en est un très-grand de faire quelque cas de ces colifichets, d’estimer heureux le peuple qui les porte, et de consacrer à se mettre en état d’en acquérir de semblables un temps et des soins que tout homme doit à de plus nobles objets. Je n’ai pas besoin d’apprendre quel est le métier de celui qui s’occupe de telles vues, pour savoir le jugement que je dois porter de lui.

J’ai passé le beau portrait qu’on nous fait ici des savants, et je crois pouvoir me faire un mérité de cette complaisance. Mon adversaire est moins indulgent : non-seulement il ne m’accorde rien qu’il puisse me refuser, mais, plutôt que de passer condamnation sur le mal que je pense de notre vaine et fausse politesse, il aime mieux excuser