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cellents, j’en conviens, et je l’ai déjà répété bien des fois ; mais est-ce une raison pour les administrer inconsidérément, et sans égard aux tempéraments des malades ? Tel aliment est très-bon en soi, qui, dans un estomac infirme, ne produit qu’indigestions et mauvaises humeurs. Que dirait-on d’un médecin qui, après avoir fait l’éloge de quelques viandes succulentes, conclurait que tous les malades s’en doivent rassasier ?

J’ai fait voir que les sciences et les arts énervent le courage. M. Gautier appelle cela une façon singulière de raisonner, et il ne voit point la liaison qui se trouve entre le courage et la vertu. Ce n’est pourtant pas, ce me semble, une chose si difficile à comprendre. Celui qui s’est une fois accoutumé à préférer sa vie à son devoir ne tardera guère à lui préférer encore les choses qui rendent la vie facile et agréable.

J ai dit que la science convient à quelques grands génies, mais qu’elle est toujours nuisible aux peuples qui la cultivent. M. Gautier dit que Socrate et Caton, qui blâmaient les sciences, étaient pourtant eux-mêmes de fort savants hommes, et il appelle cela m’avoir réfuté.

J’ai dit que Socrate était le plus savant des Athéniens, et c’est de là que je tire l’autorité de son témoignage : tout cela n’empêche point M. Gautier de m’apprendre que Socrate était savant.

Il me blâme d’avoir avancé que Caton méprisait les philosophes grecs ; et il se fonde sur ce que Carnéade se faisait un jeu d’établir et de renverser