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Les Exploits d’Iberville

mensonge. Elle lança un regard de mépris à la jeune fille qui le saisit au passage, puis elle répliqua :

— Je le crois bien ; mais moi, j’aurais fort à me plaindre si vous aviez la prétention…

— La jeune fille l’interrompit avec une violence dont elle ne fut pas maîtresse :

— Je n’ai jamais eu aucune prétention, s’écria-t-elle, et personne au monde n’a le droit de me parler comme si j’étais coupable ou seulement ridicule !…

— Pardon, madame, continua-t-elle en voyant la mère de Lewis presque effrayée de son emportement ; je vous ai coupé la parole, je vous ai répondu d’un ton qui ne convient pas !… Pardonnez-moi, je vous aime, je vous suis dévouée jusqu’à donner mon sang pour vous. Voilà pourquoi un soupçon de vous me fait tant de mal que j’en ai perdu l’esprit… Mais je dois me contenir et je me contiendrai !… Je vois qu’il y a entre nous je ne sais quel malentendu. Daignez vous expliquer… ou m’interroger ; je répondrai avec le calme qu’il me sera possible d’avoir.

— Ma chère Yvonne, dit la vieille femme, adoucie, je ne vous interroge pas, je vous avertis. Mon intention n’est pas de vous trouver coupable, ni de vous contrister par des questions inutiles. Vous étiez maîtresse de vos sentiments et de vos rêves d’ambition…

— Non, madame, je ne l’étais pas.