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Les Exploits d’Iberville

pour lui faire la lecture. Elle la trouva d’une pâleur qui l’inquiéta, et quand elle lui en eut demandé la cause, elle reçut une très-froide réponse.

— C’est un peu de fatigue, voilà tout ! dit-elle ; ce ne sera rien. Ayez l’obligeance de me relire le chapitre d’hier.

Pendant que la jeune fille lisait de sa voix fraîche et pure, madame Glen n’écoutait pas. Elle pensait à ce qu’elle allait faire. Elle contenait une profonde indignation contre cette jeune fille, un violent chagrin du coup qu’il lui faudrait porter à son fils, et aux souffrances de la mère se mêlait cependant l’involontaire satisfaction de rompre le projet d’un mariage qui lui déplaisait, tout en nourrissant l’espoir de renouer celui qu’elle appelait de tous ses vœux.

Quand elle eut pris son parti, elle interrompit brusquement la lectrice en lui disant d’un ton glacial :

— C’est assez, mademoiselle, j’ai à vous parler sérieusement. Mon fils a paru éprouver pour vous, dans ces derniers temps, des sentiments que vous n’avez certainement pas encouragés ?

Yvonne devint plus pâle que son interlocutrice, mais forte de sa conscience, elle répondit sans hésitation :

— J’ignore ce que vous dites, madame. Votre fils ne m’a jamais exprimé aucun sentiment dont je pusse m’alarmer sérieusement.

Madame Glen prit cette réponse pour un effronté