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Les Exploits d’Iberville

son autorité et qu’ils suivraient leur chef ou se retireraient dans les bois. Brouillan s’arrêta devant la mauvaise humeur que manifestaient les compatriotes d’Iberville. M. de Muy lui fut député pour lui déclarer que Brouillan voulait seulement être présent à la prise de St-Jean, qu’il ne prétendait rien au butin, mais qu’il voulait avoir sa part de danger et d’honneur.

D’Iberville s’efforça de calmer l’irritation des Canadiens et se concerta avec Brouillan pour aller attaquer St-Jean. Appréhendant quelque coup de vent qui aurait pu le jeter au large et peut-être le forcer d’aller en France avec cent vingt hommes qui étaient à ses charges, d’Iberville prit le chemin de terre, à travers les bois, tandis que Brouillan s’embarquait sur le Profond et faisait voile pour Ragnouse, lieu du rendez-vous.

Les Canadiens partirent de Plaisance le jour de la Toussaint 1696, pour camper au fond du port qui a près de deux lieues de profondeur. Le lendemain, ils entrèrent dans le bois, marchèrent au milieu d’un pays mouillé, couvert de mousse, où la glace se brisait sous leurs pas.

Cette pénible marche dura neuf jours, durant lesquels il fallut se frayer un chemin dans des bois épais, traverser à l’eau des rivières et des lacs, par un temps froid. Un aumônier les accompagnait c’était l’abbé Beaudoin, autrefois mousquetaire, mais alors missionnaire dans l’Acadie.