Page:Rousseau - Les exploits d'Iberville, 1888.djvu/155

Cette page a été validée par deux contributeurs.
157
Les Exploits d’Iberville

— Comment ! cent livres ? mais ne t’ai-je pas remis hier la somme nécessaire ?

— Elle n’est plus suffisante.

— Que me chantes-tu là ? Explique-toi.

— Vous savez que Tom Smüller demandait quatre cents livres pour sa pinasse. Eh bien ! au dernier moment un autre acheteur, paraît-il, a eu vent de la chose et est venu lui offrir cent livres de plus.

— Et sa parole ?

— Ah ! bien, oui, comptez-y, sur la parole de ces gens-là, et vous y perdrez votre temps.

— Mais où les trouver, les cent livres ?

— Nous avons encore la nuit et la journée pour nous pourvoir.

— Oui, mais si nous échouons ? Songe que tout est à recommencer, que M. Villedieu est prévenu, qu’il agira de son côté, qu’il nous est impossible de le prévenir et qu’il peut tout compromettre. La surveillance du port sera augmentée et adieu alors la délivrance. Nous pouvons gémir ici encore bien des années, y laisser nos os peut-être…

— Si nous prenions conseil de mademoiselle Yvonne ? Sans vous faire de peine, père Kernouët, elle a plus d’esprit dans son petit doigt que nous en avons dans nos deux jougeotes.

— Cette chère Yvonne ! reprit Kernouët d’une voix émue… Ah ! Pierre, il faut à tout prix quitter ce maudit pays, car il me la tuerait…