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Les Exploits d’Iberville

« Mais auparavant, mon ami, j’ai à remplir une promesse, il me faut acquitter un serment terrible. Le temps, la distance, de nouvelles affections me l’avaient presque fait oublier. Le vicomte de la Bouteillerie vient de me le rappeller.

« Des nouvelles de France m’apprennent que les héritiers de M. Duperret-Janson vont me faire un procès pour me forcer à quitter le nom que je porte aujourd’hui… Eh bien ! je le quitterai, ce nom ; mais je compte lui faire de belles funérailles.

— Mon enfant, interrompit d’Iberville, votre pensée est mauvaise, votre projet n’est pas celui d’un chrétien.

— Comment ?

— Un chrétien ne se venge pas, du moins ainsi que vous le voulez,

— Quoi ! ces hommes m’auront humilié, brisé, persécuté, anéanti ; ils m’auront spolié d’une fortune qui m’appartenait réellement puisque telle était la volonté de M. Duperret-Janson ; on veut m’enlever jusqu’au nom que je porte, et je ne me vengerai pas !

— Non, mon enfant : la vengeance n’appartient qu’à Dieu, parce que lui seul a le temps et l’éternité, ces deux choses qui échappent aux hommes.

— Urbain resta sombre et ne répondit pas.

— Croyez-moi, reprit d’Iberville, vous avez un rôle plus noble, une vengeance plus belle à exercer que celle que vous méditez.