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Les Exploits d’Iberville

pelle pas ces jours heureux sans un profond attendrissement ; car je l’aimais d’une tendresse infinie, mon protecteur.

Le jeune homme se tut quelques instants, succombant sous le poids de ses souvenirs et d’Iberville respecta son silence. Puis passant la main sur son front, comme pour en chasser les pensées sombres, il reprit :

« Cependant M. Duperret-Janson, pensant qu’un jeune homme a besoin de distractions, ouvrit les portes de son château à la noblesse du voisinage. Ce ne fut chaque jour que fêtes, carrousels, nombreuses réunions, où je faisais assez jolie figure, à la grande joie du marquis. »

XV

Une catastrophe


« Il me faut maintenant tout mon courage pour vous apprendre les faits qui vont suivre, car je touche à l’époque la plus douloureuse de ma vie.

« Le jour où j’atteignis ma dix-huitième année, j’étais dans ma chambre un peu avant dix heures quand le valet de chambre du marquis vint me prévenir que j’étais attendu au grand salon. Je m’y rendis aussitôt. Le vieillard vint au-devant de moi avec son bon sourire et me baisa tendrement sur le front. Oh ! je sens encore l’impression de ce baiser du meilleur des hommes !