Page:Rousseau - Les exploits d'Iberville, 1888.djvu/118

Cette page a été validée par deux contributeurs.
120
Les Exploits d’Iberville

la conversation suivante — conversation qui est restée gravée dans mon esprit comme si c’était d’hier — s’engagea entre le marquis et mon père :

— Eh bien ! maître Pierre, dit le marquis, on sera donc toujours braconnier ? Mes gardes m’ont appris qu’hier encore ils vous avaient surpris sur mes terres en flagrant délit.

— Pour l’amour du bon Dieu, peut-on me calomnier jusqu’à ce point, monsieur le marquis.

— Passe encore pour cette fois, maître Pierre ; mais je vous avertis que ce sera la dernière.

— Je vous jure…

— Assez, maître Pierre ; aussi bien c’est un autre motif qui m’a fait vous appeler par votre femme au château.

— Je vous écoute de mes deux oreilles, monsieur le marquis.

— Bien. Approchez, mon enfant, fit-il en m’invitant du geste et du sourire.

« Confondu, intimidé de me voir dans ce beau salon et en présence de ce personnage imposant, j’obéis à l’intimation cependant, un peu aidé du reste par le regard sévère de mon père.

— Savez-vous, continua le marquis, en me posant la main sur la tête, que votre enfant, maître Pierre, m’a sauvé la vie ?

— Ma femme m’a dit quelque chose comme cela, et je bénis le hasard…