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Les Exploits d’Iberville

appelait de tous ses vœux ; mais il était aussi fervent chrétien. Il aurait donc cru commettre sur sa personne un détestable suicide et un acte de lâcheté en ne cherchant pas, par tous les moyens possibles, à sauver cette existence sombre, à laquelle pourtant il tenait si peu. Il appuya donc fortement sur la bride en même temps qu’il attaquait le cheval avec la jambe gauche, afin de le forcer à volter de nouveau, mais le rêne se brisa à deux endroits.

« Il se sentit alors perdu, car il aurait été fou de songer à sauter sur la route en vidant les étriers. Le pieux marquis, dans une pensée, recommanda son âme à Dieu, tira de sa poitrine un médaillon renfermant des cheveux de tous les êtres chéris qu’il avait perdus, médaillon qu’il porta à ses lèvres, puis tout bas, bien bas :

— Enfin, mon Dieu ! murmura-t-il.

« Il ferma les yeux et attendit stoïquement la mort. »

XIV

L’enfant d’adoption


« Au moment même où cheval et cavalier débouchaient de la forêt, à quelques pas du sentier, un artiste aurait trouvé un spectacle digne du pinceau le plus délicat. Près d’un gros chêne, ayant un manteau de verdure enlacé au tronc de l’arbre pour