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accordée. La volonté de mon père, fit-elle mon malheur, ce qu’il veut, je dois le vouloir… et cependant…

Elle parut hésiter.

— Parlez, mademoiselle, insista Bigot.

— Cependant, acheva Claire, je ne vous aime pas, moi, et c’est parce qu’il m’est impossible… de vous aimer… parce que mon cœur, hélas ! ne m’appartient plus…

— Ce que vous me dites là ne m’étonne pas, mademoiselle.

Claire tressaillit.

— Mais, continua Bigot, je vous aime, moi, et je m’efforcerai de mériter votre amour.

— On n’aime point deux hommes à la fois, monsieur l’Intendant.

— Mais on peut oublier.

— Je ne le crois pas.

Bigot était fort calme et même souriant. Ce calme exaspéra Claire.

— Mais, monsieur, dit-elle avec vivacité, on n’épouse pas, quand on est un galant homme, une jeune fille qui… ne vous aime pas.

Bigot s’inclina ironiquement.

— Qui aime… ailleurs, acheva Claire.