Page:Rousseau - La Sagesse de Jean-Jacques, 1878, éd. Roget.djvu/42

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 30 —

qui sait dire au juste oublié : tes vertus ont un témoin ; c’est lui, c’est sa substance inaltérable qui est le vrai modèle des perfections dont nous portons tous une image en nous-mêmes. Nos passions ont beau la défigurer ; tous ses traits liés à l’essence infinie se représentent toujours à la raison et lui servent à rétablir ce que l’imposture et l’erreur en ont altéré.

— Tenez votre âme en état de désirer toujours qu’il y ait un Dieu, et vous n’en douterez jamais.

— Vous me marquez, Monsieur, que le résultat de vos recherches sur l’Auteur des choses est un état de doute. Je ne puis juger de cet état, parce qu’il n’a jamais été le mien. J’ai cru dans mon enfance par autorité, dans ma jeunesse par sentiment, dans mon âge mûr par raison, maintenant je crois parce que j’ai toujours cru.

(Lettre écrite en 1769)

— O homme, qui que tu sois, rentre en toi-même, apprends à consulter ta conscience et tes facultés naturelles ; tu seras juste, bon, vertueux, tu t’inclineras devant ton maître, et tu participeras dans son ciel à un bonheur éternel. Je ne me fie là-dessus ni à ma raison, ni à celle d’autrui, mais je sens à la paix de mon âme et au plaisir que je sens à vivre et à penser sous les yeux du grand Etre, que je ne m’abuse point