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La Monongahéla

— Faible secours ! madame, fit Nicolas de Neuville en lançant un regard vers Irène de Linctôt.

— Figurez-vous, messieurs, reprit madame de Vaudreuil, que M. de Sabrevois tombe cette fois-ci en pleine hérésie : il affirme, par exemple, que l’amour vrai, honnête, n’existe pas plus que la beauté qui est une affaire de mode, d’engouement. Ainsi, pour M. de Sabrevois, les femmes déguenillées et sales de ces affreux sauvages que nous voyons tous les jours, au point de vue du beau, sont aussi remarquables que… disons Léonine de Beaujeu qui rougit d’avance parce qu’elle a peur que je vous signale son joli visage.

— Quel blasphème ! fit Nicolas.

— Madame, reprit de Sabrevois, je ne nie pas l’amour, mais seulement nous ne le comprenons pas de la même façon.

— Vous y croyez ?

— Jusqu’à un certain point, oui, madame.

— Qu’est-ce donc alors que l’amour suivant vous ?

— L’amour ? madame.

— Oui.

— Mais c’est une vibration désordonnée de certains lobes du sinciput correspondant avec quelques lobes parallèles de l’occiput. Quant à la femme…

— Tenez, mon cher ami, reprit en souriant ma-