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La Monongahéla

poitrines ; la vie de tous les spectateurs est en quelque sorte suspendue. Dona Maria, les mains levées au ciel, a dirigé un regard chargé d’angoisse vers le jeune homme au costume de cour qu’elle a remarqué tout à l’heure, comme si elle espérait qu’il lui fut possible de sauver ce malheureux qui est infailliblement perdu.

Le taureau est rendu sur sa victime ; il n’a plus qu’à prendre un dernier élan ; mais l’inconnu, après avoir de nouveau porté la main à son cœur en s’inclinant, a sauté dans l’arène en dégainant sa courte rapière. Il arrache en passant un voile de pourpre des mains d’un banderillo et au moment où le taureau va s’élancer, il le lui a suspendu aux cornes. Vif comme l’éclair, il n’a fait que poser son pied sur la tête de l’animal pour sauter de plusieurs pieds derrière lui.

La foule applaudit des mains et des acclamations saluent cet acte de bravoure et d’agilité.

Le cavalier en péril a eu le temps de disparaître ; mais le taureau, qui est parvenu à se débarrasser de son bandeau, se précipite sur ce nouvel ennemi. Le jeune homme l’attend de pied ferme. Aussitôt que la bête a baissé la tête pour se précipiter à l’attaque, l’inconnu coure à sa rencontre. En deux bonds il est sur le dos de l’animal et lui plonge au défaut de l’épaule son épée jusqu’à la garde.

Alors épuisé, frappé à mort, il tombe en lançant