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II [1]


Les divers morceaux qui sont compris dans cet Appendice proviennent de la collection de manuscrits de Rousseau, léguée à Neuchâtel par du Peyrou. Le premier et de beaucoup le plus important, qui avait pour titre : Que l’état de guerre naît de l’état social, forme un petit cahier de 12 pages, catalogué sous le no 7856 à la bibliothèque de Neuchâtel. Plusieurs extraits, assez courts il est vrai, de ce manuscrit ont passé dans le Contrat social, mais il est surtout intéressant en ce qu’il nous offre une esquisse sommaire du système politique de Rousseau. Les autres fragments sont disséminés dans un même manuscrit (no 7840 du catalogue), sorte de registre assez volumineux qui renferme quantité de morceaux, d’importance et d’étendue inégales, tous de la main de Jean-Jacques. Ils sont écrits à la plume ou au crayon, dans un fouillis pittoresque, quelquefois à côté d’un compte de blanchissage, qui pourrait peut-être servir à préciser la date de leur composition. Nous avons cru devoir reproduire les quelques passages qui se rapportent principalement à des matières traitées au chapitre de l’Esclavage du Contrat social. Selon le plan originaire de l’auteur, ils devaient sans doute former un livre spécial sur le droit de guerre et sur les principes qui devraient régir les relations d’État à État dans le système fédératif.

QUE L’ÉTAT DE GUERRE NAÎT DE L’ÉTAT SOCIAL [2]


Mais quand il serait vrai, que cette convoitise illimitée et indomptable serait développée dans tous les hommes au point que le suppose notre sophiste, encore ne produirait-elle pas cet état de guerre universelle de chacun contre tous dont Hobbes ose tracer l’odieux tableau. Ce désir effréné de s’approprier toutes choses est incompatible avec celui de détruire tous ses semblables ; le vainqueur[3] qui ayant tout tué aurait le malheur de rester seul au monde n’y jouirait de rien par cela même qu’il aurait tout. Les richesses elles—mêmes a quoi sont-elles bonnes si ce n’est à être communiquées ; que lui servirait

  1. (*) Les variantes du manuscrit, effacées par l’auteur, sont notées ici en caractères italiques.
  2. Le titre est barré dans le manuscrit.
  3. Le malheureux.