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166 DU CONTRAT SOCIAL. C H A P I T R E X I V SUITE 1 y A l’instant que le peuple est légitimement assemblé en J corps souverain, toute juridiction du gouvernement cesse, la pl1lSS&I1CC €XéCl1Il.V€ est S�Sp€I1dL1€, et la p€1‘SOI`m€ du dernier citoyen est aussi sacrée et inviolable que celle du pI`€I'I1l€I` magistrat, pa1‘C€ ql.1’0{1 SE tI`OUV€ le I‘€pl'éS€I'1té il Iliy E a plus de représentant (1). La plupart des tumultes qui est toujours celui dont lcs habitants sont le plus également répandus sur I le territoire : celui qui n’a pas de si grandes villes, et qui par conséquent J brille moins, battra touiours l’autre. Ce sont les grandes villes qui épuisent i un Etat et font sa faiblesse: la richesse qu’elles produisent est une richesse apparente et illusoire; c’est beaucoup d’argent et peu d’effet. On dit que la ville de Paris vaut une province au roi de France; moi je crois qu’elle lui en coute plusieurs; que c’est 21 plus d’un égard que Paris est nourri par les provinces, et que la plupart de leurs revenus se versent dans cette ville et - y restent, sans jamais retourner au peuple ni au roi. Il est inconcevable I que, dans ce siécle de calculateurs, il n’y en ait pas un qui sache voir que la France serait beaucoup plus puissante si Paris était anéanti. Non seule- ment le peuple mal distribué n’est pas avantageux a l’Etat, mais il est plus ruineux que la dépopulation méme, en ce que la dépopulation ne donne ( qu’un produit nul, et que la consommation mal entendue donne un produit _ négatif. Quand j’entends un Francais et un Anglais, tout tiers de la grandeur · de leurs capitales, disputer entre eux lequel de Paris ou de Londres con- tient le plus d’habitants, c’est pour moi comme s’ils disputaient ensemble 4 lequel des deux peuples al’honneur d’etre le plus mal gouverné. Etudiez un peuple hors de ses villes, ce n’est qu‘ainsi que vous le con- , ` naitrez. Ce n’est rien de voir la forme apparente d’un gouvernement, fardée . ( par l’appareil de Padministration et par le jargon des administrateurs, si l’on n’en étudie aussi la nature par les effets qu’il produit sur le peuple et dans tous les degrés de l’administration. La différence de la forme au fond se trouvant partagée entre tous ces degrés, ce n’est qu’en les embrassant l tous qu’on connait cette différence. Dans tel pays c’est par les manoeuvres · des subdélégués qu’on commence 21 sentir l’esprit du ministere;dans tel autre il faut voir élire les membres du parlement pour juger s‘il est vrai { que la nation soit libre : dans quelque pays que ce soit il est impossible l que qui n’a vu que les villes connaisse le gouvernement, attendu que l‘esprit n’en est jamais le méme pour la ville et pour la campagne. Or c’est la cam- _ pagne qui fait le pays, et c’est le peuple de la campagne qui fait la nation. ' I (1) R. Gouvemement de Polognc, chap. vi. — Sitot que la puissance légis- A lative parle, tout rentre dans l’égalité, toute autorité se tait devant elle, sa ( voix est la voix de Dieu sur la terre. ° { i l