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LIVRE DEUXIÈME 187

qui les habitent, dont les uns consomment peu dans un pays fertile, les autres beaucoup sur un sol ingrat. Il faut encore avoir égard à la plus grande ou moindre fécondité des femmes, à ce que le pays peut avoir de plus ou moins favorable à la popu- lation, à la quantité dont le législateur peut espérer d'y concourir par ses établissements (*), de sorte qu'il ne doit pas fonder son jugement sur ce qu'il voit, mais sur ce qu'il prévoit, ni s'arrêter autant à l'état actuel de la population qu'à celui où elle doit naturellement parvenir. Enfin il y a mille occasions où les accidents particuliers du lieu exigent ou per- mettent qu'on embrasse plus de terrain qu'il ne paraît nécessaire. Ainsi Ton s'étendra beaucoup dans un pays de montagnes, où les productions natu- relles, savoir, les bois, les pâturages, demandent moins de travail, où l'expérience apprend que les femmes sont plus fécondes que dans les plaines ( 2 ) et où un grand sol incliné ne donne qu'une petite base horizontale, la seule qu'il faut compter pour la végétation. Au contraire, on peut se resserrer au bord de la mer, même dans des rochers et des sables presque stériles, parce que la pêche y peut suppléer en grande partie aux productions de la terre, que les hommes doivent être plus rassemblés pour repousser les pirates, et qu'on a d'ailleurs plus de facilité pour délivrer le pays, par les colonies, des habitants dont il est surchargé.

(') Le législateur doit, en effet, par de sages institutions, tâcher de porter la population jusqu'au point où elle aura le maximum de force.

( 2 ) La proportion des naissances semble dépendre beaucoup plus de l'état moral et social que de la structure du sol, dont l'influence n'est au moins qu'indirecte.

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