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qui parle, se modifie différemment, selon les hommes, les Langues & les caracteres. Le second est l’Art de parler aux yeux sans le secours de l’écriture, par des mouvemens du corps devenus signes de convention. Comme ce geste est plus pénible, moins naturel pour nous que l’usage de la parole, & qu’elle le rend inutile, il l’exclud, & même en suppose la privation ; c’est ce qu’on appelle Art des Pantomimes. À cet Art ajoutez un choix d’attitudes agréables & de mouvemens cadencés, vous aurez ce que nous appellons la Danse, qui ne mérite gueres le nom d’Art quand elle ne dit rien à l’esprit.

Ceci posé, il s’agit de savoir si, la Danse étant un langage, & par conséquent pouvant être un Art d’imitation, peut entrer avec les trois autres dans la marche de l’Action lyrique, ou bien si elle peut interrompre & suspendre cette action sans gâter l’effet et l’unité de la Piece.

Or, je ne vois pas que ce dernier cas puisse même faire une question. Car chacun sent que tout l’intérêt d’une Action suivie dépend de l’impression continue & redoublée que sa représentation fait sur nous ; que tous les objets qui suspendent ou partagent l’attention sont autant de contre-charmes qui détruisent celui de l’intérêt ; qu’en coupant le Spectacle par d’autres Spectacles qui lui sont étrangers, on devise le sujet principal en parties indépendantes qui n’ont rien de commun entr’elles que le rapport général de la matiere qui les compose ; & qu’enfin plus les Spectacles inférés seroient agréables, plus la mutilation du tout seroit difforme. De sorte qu’en supposant un Opéra coupé par quelques Divertissemens qu’on pût imaginer, s’ils laissoient oublier le sujet