Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t9.djvu/146

Cette page n’a pas encore été corrigée

tournant tout en plaisanterie : les femmes y sont fort galantes, les hommes fort dissipés, & le pays produit d’excellent vin ; le moyen de n’y pas chanter sans cessé ? Nous avons encore d’anciennes Chansons de Thibault, Comte de Champagne, l’homme le plus galant de son siecle, mises en Musique par Guillaume de Machault. Marot en fit beaucoup nous restent, &grace aux Airs d’Orlande & de Claudin, nous en avons aussi plusieurs de la Pléiade de Charles IX. Je ne parlerai point des Chansons plus modernes, par lesquelles les Musiciens Lambert, du Bousset, la Garde & autres, ont acquis un nom, & dont on trouvé autant de Poetes, qu’il y a de gens de plaisir parmi le Peuple du monde qui s’y livré le plus, quoique non pas tous aussi célebres que le Comte de Coulange & l’Abbé de Lattaignant. La Provence & le Languedoc n’ont point non plus, dégénéré de leur premier talent. On voit toujours régner dans ces Provinces un air de gaieté qui porte sans cessé leurs habitans au Chant & à la Danse. Un Provençal menace, dit-on, son ennemi d’une Chanson, comme un Italien menaceroit le sien d’un coup de stilet ; chacun à ses armes. Les autres Pays ont aussi leurs Provinces Chansonniers ; en Angleterre, c’est l’Ecosse ; en Italie, c’est Venise. (Voyez BARCAROLLES.)

Nos Chansons sont de plusieurs sortes ; mais en général elles roulent ou sur l’amour, ou sur le vin, ou sur la satyre. Les Chansons d’amour sont ; les Airs tendres qu’on appelle encore Airs sérieux ; les Romances, dont le caractere est d’émouvoir l’ame insensiblement par le récit tendre & naïf de quelque histoire amoureuse & tragique ; les Chansons pastorales