Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t7.djvu/415

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de mes arrieres-petits-neveux & deux Julies mes arrieres-petites-niéces, l’une par le fer, l’autre par la faim. Grand Jupiter, ſi vous l’admettez parmi nous, à tort ou non, ce ſera ſurement à votre blâme. Car dis-moi, je te prie, ô divin Claude, pourquoi tu fis tant tuer de gens ſans les entendre, ſans même t’informer de leurs crimes ? C’étoit ma coutume. Ta coutume ? On ne la connoît pas ici. Jupiter qui regne depuis tant d’années a-t-il jamais rien fait de ſemblable ? Quand il eſtropia ſon fils, le tua-t-il ? Quand il pendit ſa femme, l’étrangla-t-il ? Mais toi n’as-tu pas mis à mort Meſſaline, dont j’étois le grand oncle ainſi que le tien[1] ? Je j’ignore, dis-tu ? Miſérable ! Ne ſais-tu pas, qu’il t’eſt plus honteux de l’ignorer que de l’avoir fait ?

Enfin Caius Caligula s’eſt reſſuſcité dans ſon ſucceſſeur. L’un fait tuer ſon beau-pere[2], & l’autre ſon gendre[3]. L’un défend qu’on donne au fils de Craſſus le ſurnom de grand, l’autre le lui rend & lui fait couper la tête. Sans reſpect pour un ſang illuſtre, il fait périr dans une même maiſon Scribonie, Triſtonie, Aſſarion, & même Craſſus le grand, ce pauvre Craſſus ſi complétement ſot qu’il eût mérité de régner : ſongez Peres Conſcripts, quel monſtre oſe aſpirer à ſiéger parmi nous ! Voyez, comment déifier une telle figure, vil ouvrage des Dieux irrités ! A quel culte, à

  1. Par l’adoption de Druſus, Auguſte étoit l’ayeul de Claude, mais il étoit auſſi ſon grand oncle par la jeune Antonia mere de Claude & niece d’Auguſte.
  2. M. Syllanus.
  3. Pompeius magnus.