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promeſſes & de menaces, on leur parloit comme à des gens à qui la paix n’ôtoit rien & qui ne pouvoient ſoutenir la guerre : mais tout cela n’ébranla point la fidélité des Prétoriens.

Alors Othon & Vitellius prirent le parti d’envoyer des aſſaſſins, l’un en Allemagne & l’autre à Rome, tous deux inutilement. Ceux de Vitellius, mêlés dans une ſi grande multitude d’hommes inconnus l’un à l’autre, ne furent pas découverts, mais ceux d’Othon furent bientôt trahis par la nouveauté de leurs visages parmi des gens qui ſe connoiſſoient tous. Vitellius écrivit à Titien, frere d’Othon, que sa vie & celle de ses fils lui répondroient de ſa mere & de ſes enfans. L’une & l’autre famille fut conſervée. On douta du motif de la clémence d’Othon ; mais Vitellius, vainqueur, eut tout l’honneur de la ſienne.

La premiere nouvelle qui donna de la confiance à Othon lui vint d’Illyrie, d’où il apprit que les légions de Dalmatie, de Pannonie & de la Moeſie avoient prêté ſerment en ſon nom. Il reçut d’Espagne un ſemblable avis & donna par édit des louanges à Cluvius Rufus ; mais on fut bientôt après que l’Eſpagne s’étoit retournée du côté de Vitellius. L’Aquitaine que Julius Cordus avoir aussi fait déclarer pour Othon ne lui reſta pas plus fidelle. Comme il n’étoit pas queſtion de foi ni d’attachement, chacun ſe laiſſoit entraîner çà & là ſelon ſa crainte ou ſes eſpérances. L’effroi fit déclarer de même la Province Narbonnoiſe en faveur de Vitellius qui, le plus proche & le plus puiſſant, parut aiſément le plus légitime.