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en tirer un bon usage. Telle est la différence essentielle des cercles aux spectacles.

Les citoyens d’un même Etat, les habitans d’une même ville ne sont point des Anachoretes, ils ne sauroient vivre toujours seuls & sépares ; quand ils le pourroient, il ne faudroit pas les y contraindre. Il n’y a que le plus farouche despotisme qui s’alarme à la vue de sept ou huit hommes assembles, craignant toujours que leurs entretiens ne roulent sur leurs miseres.

Or de toutes les sortes de liaisons qui peuvent rassembler les particuliers dans une ville comme la notre, les cercles forment, sans contredit, la plus raisonnable, la plus honnête, & la moins dangereuse : parce qu’elle ne veut ni ne peut se cacher, qu’elle est publique, permise, & que l’ordre & la regle y regnent. Il est même facile à démontrer que les abus qui peuvent en résulter naîtroient également de toutes les autres, ou qu’elles en produiroient de plus grands encore. Avant de songer à détruire un usage établi, on doit avoir bien pèse ceux qui s’introduiront à sa place. Quiconque en pourra proposer un qui soit praticable & duquel ne résulté aucun abus, qu’il le propose, & qu’ensuite les cercles soient abolis : à la bonne heure. En attendant, laissons, s’il le faut, passer la nuit à boire à ceux qui, sans cela, la passeroient peut-être à faire pis.

Toute intempérance est vicieuse, & sur-tout celle qui nous ôte la plus noble de nos facultés. L’excès c u vin dégrade l’homme, aliène au moins sa raison pour un tems & l’abrutit à la longue. Mais enfin, le goût du vin n’est pas un