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les mains du Peuple, le Législateur existe toujours, quoiqu’il ne se montre pas toujours. Il n’est rassemblé & ne parle authentiquement que dans le Conseil général ; mais hors du Conseil général, il n’est pas anéanti ; ses membres sont épars, mais ils ne sont pas morts ; ils ne peuvent parler par des Loix, mais ils peuvent toujours veiller sur l’administration des Loix : c’est un droit, c’est même un devoir attaché à leurs personnes, & qui ne peut leur être ôté dans aucun tems. De-là le droit de Représentation. Ainsi la Représentation d’un Citoyen, d’un Bourgeois, ou de plusieurs, n’est que la déclaration de leur avis sur une matière de leur compétence. Ceci est le sens clair & nécessaire de I’Edit de 1707, dans l’article V qui concerne les Représentations.

Dans cet article on proscrit avec raison la voie des signatures, parce que cette voie est une manière de donner son suffrage, de voter par tête comme si déjà l’on étoit en Conseil général, & que la forme du Conseil général ne doit être suivie que lorsqu’il est légitimement assemblé. La voie des Représentations a le même avantage, sans avoir le même inconvénient. Ce n’est pas voter en Conseil général, c’est opiner sur les matières qui doivent y être portées ; puisqu’on ne compte pas les voix, ce n’est pas donner son suffrage, c’est seulement dire son avis. Cet avis n’est, à la vérité, que celui d’un particulier ou de plusieurs ; mais ces particuliers étant membres du Souverain, & pouvant le représenter quelquefois par leur multitude, la raison veut qu’alors on ait égard à leur avis, non comme à une décision, mais comme à une proposition qui la demande, & qui la rend quelquefois nécessaire.