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ne savez voir que l’homme dans les mains du Diable, & moi je vois comment il y est tombé ; la cause du mal est, selon vous, la nature corrompue, & cette corruption même est un mal dont il faloit chercher la cause. L’homme fut créé bon ; nous en convenons, je crois, tous les deux : mais vous dites qu’il est méchant, parce qu’il a été méchant ; & moi je montre comment il a été méchant. Qui de nous, à votre avis, remonte le mieux au principe ?

Cependant vous ne laissez pas de triompher à votre aise, comme si vous m’aviez terrassé. Vous m’opposez comme une objection insoluble ce mélange frappant de grandeur & de bassesse, d’ardeur pour la vérité & de goût pour l’erreur, d’inclination pour la vertu & de penchant pour le vice, qui se trouve en nous. Etonnant contraste, ajoutez-vous, qui déconcerte la philosophie païenne, & la laisse errer dans de vaines spéculations !*

[Mandement, III.]


Ce n’est pas une vaine spéculation que la Théorie de l’homme, lorsqu’elle se fonde sur la nature, qu’elle marche à l’appui des faits par des conséquences bien liées, & qu’en nous menant à la source des passions, elle nous apprend à régler leur cours. Que si vous appellez philosophie païenne