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cette procédure, ont hautement déclaré que le bien de la Religion ne leur permettoit pas de reconnoître leur tort, ni l’honneur du Gouvernement de réparer leur injustice. Il faudroit un Ouvrage entier pour montrer les conséquences de cette maxime, qui consacre & change en arrêt du destin toutes les iniquités des Ministres des Loix. Ce n’est pas de cela qu’il s’agit encore, & je ne me suis proposé jusqu’ici que d’examiner si l’injustice avoit été commise, & non si elle devoit être réparée. Dans le cas de l’affirmative, nous verrons ci-après quelle ressource vos Loix se sont ménagée pour remédier à leur violation. En attendant, que faut-il penser de ces Juges inflexibles, qui procedent dans leurs jugemens aussi légerement que s’ils ne tiroient point à conséquence, & qui les maintiennent avec autant d’obstination que s’ils y avoient apporté le plus mûr examen ?

Quelque longues qu’aient été ces discussions, j’ai cru que leur objet volts donneroit la patience de les suivre ; j’ose même dire que vous le deviez, puisqu’elles sont autant l’apologie de vos Loix que la mienne. Dans un pays libre & dans une Religion raisonnable, la Loi qui rendroit criminel un Livre pareil au mien seroit une Loi funeste, qu’il faudroit se hâter d’abroger pour l’honneur & le bien de l’Etat. Mais, grâce an Ciel, il n’existe rien de tel parmi vous, comme je viens de le prouver, & il vaut mieux que l’injustice dont je suis la victime soit l’ouvrage dit Magistrat que des Loix ; car les erreurs des hommes sont passageres, mais celles des Loix durent autant qu’elles. Loin que l’ostracisme qui m’exile à jamais de mon pays soit l’ouvrage