C’est revenir tard, je le sens, sur un sujet trop
rebattu, & déjà presque oublié. Mon état, qui ne
me permet plus aucun travail suivi, mon aversion
pour le genre polémique, ont causé ma lenteur à
écrire & ma répugnance à publier. J’aurois même
tout-à-fait supprimé ces Lettres, ou plutôt je ne les
aurois point écrites, s’il n’eût été question que de
moi : mais ma Patrie ne m’est pas tellement devenue
étrangere, que je puisse voir tranquillement opprimer
ses Citoyens, sur-tout lorsqu’ils n’ont compromis leurs
droits qu’en défendant ma Cause. Je serois le dernier
des hommes, si, dans une telle occasion, j’écoutois
un sentiment qui n’est plus ni douceur ni patience,
mais foiblesse & lâcheté, dans celui qu’il empêche de
remplir son devoir.
Rien de moins important pour le Public, j’en conviens, que la matiere de ces Lettres. La constitution d’une petite République, le sort d’un petit Particulier, l’exposé de quelques injustices, la réfutation de quelques sophismes ; tout cela n’a rien en soi d’assez considérable pour mériter beaucoup de Lecteurs : mais si mes sujets sont petits, mes objets sont grands, & dignes de l’attention de tout honnête-homme. Laissons