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le tout ; tant que ce rapport subsiste, il n’y a donc plus de tout, mais deux parties inégales.

Au contraire, quand tout le peuple statue sur tout le peuple, il ne considère que lui-même ; & s’il se forme un rapport, c’est de l’objet entier sous un point de vue à l’objet entier sous un autre point de vue, sans aucune division du tout. Alors l’objet sur, lequel on statue est général, & la volonté qui statue est aussi générale. Nous examinerons s’il y a quelque autre espèce d’acte qui puisse porter le nom de loi.

Si le souverain ne peut parler que par des lois, & si la loi ne peut jamais avoir qu’un objet général & relatif également à tous les membres de l’Etat, il s’ensuit que le souverain n’a jamais le pouvoir de rien statuer sur un objet particulier ; et, comme il importe cependant à la conservation de l’Etat qu’il soit aussi décidé des choses particulières, nous rechercherons comment cela peut se faire.

Les actes du souverain ne peuvent être que des actes de volonté générale, des lois ; il faut ensuite des actes déterminants, des actes de force ou de gouvernement, pour l’exécution de ces mêmes lois ; & ceux-ci, au contraire, ne peuvent avoir que des objets particuliers. Ainsi l’acte par lequel le souverain statue qu’on élira un chef est une loi, & l’acte par lequel on élit ce chef en exécution de la loi n’est qu’un acte de gouvernement.

Voici donc un troisième rapport sous lequel le peuple assemblé peut être considéré, savoir comme magistrat ou exécuteur de la loi qu’il a portée comme souverain.*

[*Ces questions & propositions sont la plupart extraites du Traité de Contrat social, extroit lui-même d’un plus grand ouvrage, entrepris sans consulter mes forces, & abandonné depuis longtemps. Le petit traité que j’en ai détaché, et dont c’est ici le sommaire, sera publié à part.]