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s’enfle ? A-t-il peur qu’on ne l’ait pas compris ? A-t-il besoin, ce grand peintre, d’écrire les, noms au-dessous des objets qu’il peint ? Loin de généraliser par là sa morale, il la particularise, il la restreint en quelque sorte aux exemples cités, & empêche qu’on ne l’applique à d’autres. Je voudrois qu’avant de mettre les fables de cet auteur inimitable entre les mains d’un jeune homme, on en retranchât toutes ces conclusions par lesquelles il prend la peine d’expliquer ce qu’il vient de dire aussi clairement qu’agréablement. Si votre élève n’entend la fable qu’à l’aide de l’explication, soyez sûr qu’il ne l’entendra pas même ainsi.

Il importeroit encore de donner à ces fables un ordre plus didactique & plus conforme aux progrès des sentiments & des lumières cru jeune adolescent. Conçoit-on rien de moins raisonnable que d’aller suivre exactement l’ordre numérique du livre, sans égard au besoin ni à l’occasion ? D’abord le corbeau, puis la cigale [1], puis la grenouille, puis les deux mulets, etc. J’ai sur le cœur ces deux mulets, parce que je me souviens d’avoir vu un enfant élevé pour la finance, & qu’on étourdissoit de l’emploi qu’il alloit remplir, lire cette fable, l’apprendre, la dire, la redire cent & cent fois, sans en tirer jamais la moindre objection contre le métier auquel il étoit destiné. Non seulement je n’ai jamais vu d’enfants faire aucune application solide des fables qu’ils apprenaient, mais je n’ai jamais vu que personne se souciât de leur faire faire cette application. Le prétexte de cette étude est

  1. Il faut encore appliquer ici la correction de M. Formey. C’est la cigale, puis le corbeau, etc.