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connaissances vous force à lui montrer la mutuelle dépendance des hommes, au lieu de la lui montrer par le côté moral, tournez d’abord toute son attention vers l’industrie & les arts mécaniques, qui les rendent utiles les uns aux autres. En le promenant d’atelier en atelier, ne souffrez jamais qu’il voie aucun travail sans mettre lui-même la main à l’œuvre, ni qu’il en sorte sans savon parfaitement la raison de tout ce qui s’y fait, ou du moins de tout ce qu’il a observé. Pour cela, travaillez vous-même, donnez-lui partout l’exemple ; pour le rendre maître, soyez partout apprenti, & comptez qu’une heure de travail lui apprendra plus de choses qu’il n’en retiendroit d’un jour d’explications.

Il y a une estime publique attachée aux différens arts en raison inverse de leur utilité réelle. Cette estime se mesure directement sur leur inutilité même, & cela doit être. Les arts les plus utiles sont ceux qui gagnent le moins, parce que le nombre des ouvriers se proportionne au besoin ses hommes, & que le travail nécessaire à tout le monde reste forcément à un prix que le pauvre peut payer. Au contraire, ces importants qu’on n’appelle pas artisans, mais artistes, travaillant uniquement pour les oisifs & les riches, mettent un prix arbitraire à leurs babioles ; et, comme le mérite de ces vains travaux n’est que dans l’opinion, leur prix même fait partie de ce mérite, & on les estime à proportion de ce qu’ils coûtent. Le cas lu en fait le riche rie vient pas de leur usage, mais de ce que pauvre ne les peut payer. Nolo habere bona nisi quibus populus inviderit.