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figures pour voir celle dont les bords conviennent le plus exactement, & par conséquent la mieux faite ; nous disputerons si cette égalité de partage doit avoir toujours lieu dans les parallélogrammes, dans les trapezes, &c. On essayera quelquefois de prévoir le succès de l’expérience avant de la faire, on tâchera de trouver des raisons, &c.

La Géométrie n’est pour mon Éleve que l’art de se bien servir de la regle & du compas ; il ne doit point la confondre avec le dessin, où il n’employera ni l’un ni l’autre de ces instrumens. La regle & le compas seront renfermés sous la clef, & l’on ne lui en accordera que rarement l’usage & pour peu de tems, afin qu’il ne s’accoutume pas à barbouiller ; mais nous pourrons quelquefois porter nos figures à la promenade, & causer de ce que nous aurons fait ou de ce que nous voudrons faire.

Je n’oublierai jamais d’avoir vu à Turin un jeune homme, à qui, dans son enfance, on avoit appris les rapports des contours & des surfaces, en lui donnant chaque jour à choisir dans toutes les figures géométriques des gauffres isopérimetres. Le petit gourmand avoit épuisé l’art d’Archimede pour trouver dans laquelle il y avoit le plus à manger.

Quand un enfant joue au volant, il s’exerce l’œil & le bras à la justesse ; quand il fouette un sabot, il accroît sa force en s’en servant, mais sans rien apprendre. J’ai demandé quelquefois pourquoi l’on n’offroit pas aux enfans les mêmes jeux d’adresse qu’ont les hommes : la paume, le mail, le billard, l’arc, le balon, les instrumens de musique. On m’a répondu que quelques-uns de ces jeux étaient au-dessus de