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LETTRES DE DEUX AMANS,

HABITANS D’UNE PETITE VILLE AU PIED DES ALPES.

SIXIEME PARTIE

LETTRE I. DE MDE. D’ORBE À MDE. DE WOLMAR.

Avant de partir de Lausanne il faut t’écrire un petit mot pour t’apprendre que j’y suis arrivée ; non pas pourtant aussi joyeuse que j’espérois. Je me faisois une fête de ce petit voyage qui t’a toi-même si souvent tentée ; mais en refusant d’en être, tu me l’as rendu presque importun ; car quelle ressource y trouverai-je ? S’il est ennuyeux, j’aurai l’ennui pour mon compte ; & s’il est agréable, j’aurai le regret de m’amuser sans toi. Si je n’ai rien à dire contre tes raisons, crois-tu pour cela que je m’en contente ? Ma foi, cousine, tu te trompes bien fort & c’est encore ce qui me fâche, de n’être pas même en droit de me fâcher. Dis, mauvaise, n’as-tu pas honte d’avoir toujours raison avec ton amie & de résister à ce qui lui fait plaisir, sans