art infini, & par lequel le parti représentant, réduit au silence, fut pour un tems écrasé. Cette pièce, monument durable des rares talens de son auteur, étoit du procureur général T
[ronchin] , homme d’esprit, homme éclairé, très-versé dans les lois & le gouvernement de la république. Siluit terra.
Les représentans, revenus de leur premier abattement, entreprirent une réponse, & s’en tirèrent passablement avec le temps. Mais tous jetèrent les yeux sur moi, comme le seul qui pût entrer en lice contre un tel adversaire, avec espoir de le terrasser. J’avoue que je pensai de même ; & poussé par mes concitoyens, qui me faisoient un devoir de les aider de ma plume dans un embarras dont j’avois été l’occasion, j’entrepris la réfutation des Lettres écrites de la campagne, & j’en parodiai le titre par celui de Lettres écrites de la montagne, que je mis aux miennes. Je fis, & j’exécutai cette entreprise si secrètement que, dans un rendez-vous que j’eus à Thonon avec les chefs des représentants, pour parler de leurs affaires, & où ils me montrèrent l’esquisse de leur réponse, je ne leur dis pas un mot de la mienne qui étoit déjà faite, craignant qu’il ne survînt quelque obstacle à l’impression s’il en parvenoit le moindre vent, soit aux magistrats, soit à mes ennemis particuliers. Je n’évitai pourtant pas que cet ouvrage ne fût connu en France avant la publication ; mais on aima mieux le laisser paroître que de me faire trop comprendre comment on avoit découvert mon secret. Je dirai là-dessus ce que j’ai su, qui se borne à très peu de chose ; je me tairai sur ce que j’ai conjecturé.