LETTRE À Mr. J. B. *
[*M. B., à qui ces lettres sont adressées, avoit reproché à M. Rousseau la publication de la confession de foi du Vicaire Savoyard contre cette maxime expresse du Vicaire lui-même.“Tant qu’il reste quelque bonne croyance parmi les hommes, il ne faut point troubler les ames paisibles, ni allarmer la foi des simples par des difficultés qu’ils ne peuvent résoudre, & qui les inquiètent sans les éclairer.”]
À Motiers le 21 Mars 1763.
La réponse à votre objection, Monsieur, est dans le livre même d’où vous la tirez. Lisez plus attentivement le texte & les notes, vous trouverez cette objection résolue.
Vous voulez que j’ôte de mon livre ce qui est contre la religion ; mais il n’y a dans mon livre rien qui soit contre la religion.
Je voudrois pouvoir vous complaire en faisant le travail que vous me prescrivez. Monsieur, je suis infirme, épuisé ; je vieillis ; j’ai fait ma tâche, mal sans doute, mais de mon mieux. J’ai proposé mes idées à ceux qui conduisent les jeunes gens ; mais je ne sais pas écrire pour les jeunes gens.
Vous m’apprenez qu’il faut vous dire tout, ou que vous n’entendez rien. Cela me fait de désespérer, Monsieur, que vous m’entendiez jamais ; car je n’ai point, moi, le talent de parler aux gens à qui il faut tout dire.
Je vous salue, Monsieur, de tout mon cœur.