Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t16.djvu/337

Cette page n’a pas encore été corrigée

un diocèse à gouverner, si les talens décidoient des places. Il avoit été secrétaire du comte du Luc, & avoit connu très-particulièrement Jean-Baptiste Rousseau. Aussi plein d’estime pour la mémoire de cet illustre banni, que d’horreur pour celle du fourbe qui l’avoit perdu, il savoit sur l’un & sur l’autre beaucoup d’anecdotes curieuses, que Seguy n’avoit pas mises dans la vie encore manuscrite du premier, & il m’assuroit que le comte du Luc, loin d’avoir jamais eu à s’en plaindre, avoit conservé jusqu’à la fin de sa vie la plus ardente amitié pour lui. M. Maltor, à qui M. de Vintimille avoit donné cette retraite assez bonne après la mort de son patron, avoit été employé jadis dans beaucoup d’affaires, dont il avoit, quoique vieux, la mémoire encore présente & dont il raisonnoit très-bien. Sa conversation, non moins instructive qu’amusante, ne sentoit point son curé de village : il joignoit le ton d’un homme du monde aux connoissances d’un homme de cabinet. Il étoit de tous mes voisins permanens, celui dont la société m’étoit la plus agréable, & que j’ai eu le plus de regret de quitter.

J’avois à Montmorenci les Oratoriens, & entr’autres le P. B

[erthie] r, professeur de physique, auquel, malgré quelque léger vernis de pédanterie, je m’étois attaché par un certain air de bonhomie que je lui trouvois. J’avois cependant peine à concilier cette grande simplicité avec le désir & l’art qu’il avoit de se fourrer partout, chez les grands, chez les femmes, chez les dévots, chez les philosophes. Il savoit se faire tout à tous. Je me plaisois fort avec lui, j’en parlois à tout le monde. Apparemment ce que j’en disois, lui revint.