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de vouloir aussi s’approprier ainsi les prisonniers de la Reine.

Goternitz.

Enfin je tiens que c’est une nation avec laquelle il est mieux de toute façon de n’avoir aucun commerce ; trop orgueilleux amis, trop redoutables ennemis, heureux qui, n’a rien à démêler avec eux !

Frederich.

Ah ! quittez, mon pere, ces injustes préjugés. Que n’avez vous connu cet aimable peuple que vous haïssez, & qui n’auroit peut-être aucun défaut s’il avoit moins de vertus. Je l’ai vue de près cette heureuse &brillante nation, je l’ai vue paisible au milieu de la guerre, cultivant les Sciences & les Beaux Arts, & livrée à cette charmante douceur de caractere qui en tout tans lui fait recevoir également bien tous les peuples du monde, & rend la France en quelque manière la patrie commune du genre-humain. Tous les hommes sont les freres des François. La guerre anime leur valeur sans exciter leur colere. Une brutale fureur ne leur fait point haïr leurs ennemis, un sot orgueil ne les leur fait point mépriser. Ils les combattent noblement, sans calomnier leur conduite, sans outrager leur gloire, & tandis que nous leur saisons la guerre en furieux ils se contentent de nous la faire en héros.

Goternitz.

Pour cela on ne sauroit nier qu’ils ne se montrent plus humains & plus généreux que nous.