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Vous avez écrit contre la comédie, avec la dévotion d’un Capucin, & vous avez fait de méchantes comédies. Vous avez regardé comme une chose abominable qu’un Satrape ou un Duc eût du superflu, & vous avez copié de la Musique, pour des Satrapes ou des Ducs qui vous payoient avec ce superflu. Vous avez barbouillé un Roman ennuyeux, où un Pédagogue suborne honnêtement sa pupille en lui enseignant la vertu ; & la fille modeste couche honnêtement avec le Pédagogue ; & elle souhaite de tout son cœur qu’il lui fasse un enfant ; & elle parle toujours de sagesse avec son doux ami ; & elle devient femme, mere & la plus tendre amie d’un époux qu’elle n’aime pourtant pas ; & elle vit & meurt en raisonnant, mais sans vouloir prier Dieu. Docteur Pansophe, vous êtes fait le précepteur d’un certain Emile, que vous formez insensiblement par des moyens impraticables ; & pour faire un bon chrétien, vous détruisez la religion chrétienne. Vous professez par-tout un sincere attachement à la révélation, en prêchant le déisme, ce qui n’empêche pas que chez vous les déistes & les philosophes conséquens ne soient des athées. J’admire, comme je le dois, tant de candeur & de justesse d’esprit ;, mais permettez-moi de grace de croire en Dieu. Vous pouvez être un sophiste, un mauvais raisonneur, & par conséquent un écrivain pour le moins inutile, sans que je sois un athée. L’Être Souverain nous jugera tous deux ; attendons humblement son arrêt. Il me semble que j’ai fait de mon mieux pour soutenir la cause de Dieu & de la vertu, mais avec moins de bile & d’emportement que vous. Ne craignez-vous pas que, vos inutiles calomnies contre les Philosophes & contre moi,