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Il ma fait l’honneur de me mettre au nombre de ses ennemis & de ses persécuteurs. Intimement persuadé qu’on doit lui élever une statue, comme il le dit dans la lettre polie & décente de Jean-Jaques Rousseau Citoyen de Geneve, à Christophe de Beaumont Archevéque de Paris ; il pense que la moitié de l’univers est occupée à dresser cette statue sur son piédestal, & l’autre moitié à la renverser.

Non-seulement il m’a cru iconoclaste ; mais il s’est imaginé que j’avois conspiré contre lui avec le Conseil de Geneve pour faire décréter sa propre personne de prise de corps, & ensuite avec le Conseil de Berne pour le faire chasser de la Suisse.

Il a persuadé ces belles choses aux protecteurs qu’il avoit alors à Paris, & il m’a fait passer dans leur esprit pour un homme qui persécutoit en lui la sagesse & la modestie. Voici, Monsieur, comment je l’ai persécuté.

Quand je sus qu’il avoit beaucoup d’ennemis à Paris, qu’il aimoit comme moi la retraite, & que je présumai qu’il pouvoit rendre quelques services à la philosophie, je lui fis proposer par M. Marc Chapuis, citoyen de Geneve, dès l’an 1759, une maison de campagne appellée l’Hermitage que je venois d’acheter.

Il sur si touché de mes offres, qu’il m’écrivit ces propres mots :

MONSIEUR,

“Je ne vous aime point ; vous corrompez ma République en donnant des Spectacles dans votre château de Tournay, &c.” Cette lettre, de la part d’un homme qui venoit de donner à