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Il est vrai que Jore refusa sans hésiter une offre qui l’outrageoit & le déshonoroit en même-tems ; peut-on lui en faire un crime ? ne sait-on pas que ces sortes de refus ne passeront jamais pour une ostentation déplacée, & moins encore pour une preuve de la folie que l’orgueil inspire ? Ils sont dans la nature, ils devroient couvrir de honte & d’opprobre ceux qui ont le front de s’y exposer.

Mais Voltaire, selon vous, fait des bonnes œuvres, il assiste les pauvres de ses Etats naissans. Ignorez-vous que de deux presses qui travailloient dans l’Imprimerie de Cramer à Geneve, avant l’arrivée de Voltaire dans le voisinage de cette ville, quatre & quelquefois cinq travaillent perpétuellement pour le Héros de la Littérature moderne. Ecoutez ceci, M. le Rapporteur, pour le rapporter plus au long quand vous le jugerez à propos. Candide, ses cousins & ses cousines, l’Ingénu, Zapata, &c. sont des pieces qu’on ne lit pas pour rien. Le grand débit qui s’est fait de la premiere a considérablement augmenté les revenus d’un Auteur qui a eu l’adresse de la faire valoir. L’histoire de Calas & celle des Sirven, sont d’une nature à intéresser tous les états & toutes les différentes conditions des hommes. Allez à Maroc, à Alger, à Tunis, à Constantinople, vous y trouverez Candide. Croyez, que celui qui, dites-vous, se fait une affaire capitale de répandre des bienfaits dans ses terres, n’ignore pas l’art d’en trouver la source. C’est dans les innombrables Editions de ces petites brochures, que le Pactole*

[*Fleuve qui charie de l’or.] se déborde en faveur du généreux défenseur des innocens opprimés & condamnés injustement. Son