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si longue durée chez le philosophe Genevois, mais elles sont d’une nature capable de faire connoître que malgré qu’il n’y a point d’espece de frénésie qui se ressemble, & qu’elles différent toutes, que cependant il en est qui se rapprochent. On en pourroit dire de même des passions violentes, comme de l’amour du jeu, de l’ivrognerie, de l’ambition, de la haine & de la vengeance, qui tiennent beaucoup de la force ou de la foiblesse du tempérament de ceux qui ont le malheur de s’y laisser emporter.

Il en est peu qui se corrigent par les exhortations ou les menaces qu’on leur fait en leur opposant les loix divines & humaines. Les plus entêtés prennent même pour des outrages les bons conseils que leurs amis ou leurs proches s’empressent à leur donner, & les autres ne se laissent persuader que par l’impossibilité, où les mettent les causes secondes, d’atteindre à leur but un amant, parce que l’objet qui ne peut le souffrir a des yeux pour un autre ; un joueur, parce que ses finances sont taries ; un vindicatif, parce que son adversaire est plus puissant que lui ; enfin, parce que l’homme, étant subordonné, est contraint de fléchir à l’approche des circonstances.

Il n’y a point de milieu, il faut que Rousseau convienne que sa maladie n’est autre chose que le déréglement de son esprit & non pas l’effet de la perversité de son cœur. Je suis persuadé qu’un homme qui a tant soit peu si réputation à cour, préférera toujours de passer plutôt pour un esprit aliéné ou dérangé, que pour méchant, insolent, orgueilleux & ingrat. C’est cependant avec ces dernieres couleurs que M. Hume fait le tableau du caractere de son ancien ami. Il a tort, c’est pourquoi je